|
J'étais en visite sur le terrain cette semaine passée, écoutant les témoignages des sociétés qui essayent de réaliser leur passage au "lean". Et j'ai été frappé, comme je le suis souvent, par la terminologie embrouillée utilisée. Les entreprises que j'ai visitées pensaient qu'elles "ajoutaient de la valeur" mais je les ai surtout vu ajouter des coûts. Alors, laissez-moi essayer de clarifier des choses.
J'emploie toujours l'expression "créer de la valeur" plutôt que celle, plus familière, "ajouter de la valeur" parce que la première est la voix du client tandis que la dernière est la voix du comptable. Les entreprises additionnent leurs coûts - les matériaux achetés et les dépenses en capital et travail, plus leurs marges - puis soustraient les coûts des composants achetés pour déterminer combien de "valeur" elles "ont ajouté". Le problème est que ceci exclut le client, le seul qui puisse déterminer la "valeur". Souvent, ce qu'une entreprise conçoit comme "valeur ajoutée" est en fait un "coût ajouté". Ce sont seulement les clients qui savent si le surcoût crée de la "valeur", et beaucoup de managers ne leur demandent jamais !
Un exemple bref, au cas où je ne serais pas très clair : supposons qu'une entreprise achète quelques composants standards et les assemble dans un produit simple. Ces articles achetés sont clairement des coûts. Supposons maintenant que l'entreprise utilise beaucoup de personnel pour stocker ces pièces, les emporter au lieu d'assemblage, les assembler, retoucher les produits défectueux, stocker les produits finis, chercher les composants manquants, et expédier les produits. Enfin, supposons que les composants achetés coûtent 50 unités et le prix de vente du produit fini soit 100 unités. Clairement l'entreprise doit "avoir ajouté" 50 unités de "valeur". N'est-ce pas ?... Eh bien c'est faux !
Du point de vue du client cette entreprise a pu seulement avoir ajouté cinquante unités de "coût" y compris sa marge, et créé très peu de "valeur". La raison est simplement que la plupart des étapes consommant les ressources - stocker les pièces, les déplacer, les retoucher – ont ajouté des coûts supplémentaires mais aucune valeur du point de vue du client. Les clients auraient réellement trouvé le produit plus appréciable (et auraient été disposés à payer plus pour celui-ci) si ces étapes avaient été omises et le produit avait été livré plus rapidement !
Parce qu’un produit est un ensemble indivisible de valeur et de gâchis coûteux et parce que les sociétés dans la plupart des industries mélangent actuellement les deux, les clients n'ont souvent aucun autre choix que d'acheter les gaspillages avec la "valeur". Mais qu'advient-il si certaines entreprises "lean" dans votre secteur d'activité séparent la "valeur" des gaspillages et éliminent les gaspillages? Si ce n'est pas votre société, méfiez-vous!
Les mots ne peuvent remplacer l'action, mais l’usage des mauvais mots rend les bonnes actions plus difficiles à accomplir si les managers ne peuvent pas faire la différence entre la "valeur" et le coût. Ainsi j'espère que les penseurs "au plus juste" affûteront leur vocabulaire pour se concentrer sur la création réelle de "valeur", souvent en éliminant des coûts inutiles.
Jim WOMACK
Président et fondateur du Lean Enterprise Institute
Merci à Emmanuel JALLAS, LYSIPPE Consulting, pour la traduction.
|